Triumph Spitfire MKIV (1974) : Il était une fois…

Triumph Spitfire MKIV (1974) - Il était une fois
© Coventry Transport Museum

Avant de rentrer dans le vif du sujet, revenons un peu sur l’histoire industrielle de Triumph : Celle-ci débute lorsqu’un allemand prénommé Siegfried Bettmann, né à Nuremberg le 18 avril 1863, débarque à Coventry en Angleterre en 1884. Après un rapide passage dans diverses entreprises locales en tant qu’employé, Siegfried Bettmann fonde à Londres sa propre société, la S. Bettmann & Co. Import Export Agency. Ses principales activités se résument alors à acheter des bicyclettes (principalement auprès du constructeur William Andrews situé à Birmingham) afin de les revendre sous sa propre marque et à importer des machines à coudre en provenance d’Allemagne.

En 1886, la petite entreprise change de nom pour devenir la Triumph Cycle Co. Le mot « Triumph », qui apparaît donc pour la première fois, est issu d’une volonté de Siegfried Bettmann de doter son entreprise d’un nom facilement prononçable et compréhensible dans plusieurs langues.

La société obtient en 1887 le soutien financier de la Dunlop Pneumatic Tyre Co. intéressée de pouvoir promouvoir l’utilisation commerciale des pneus de bicyclette. La Triumph Cycle Co. devient la New Triumph Co. Ltd. C’est également cette année-là qu’un jeune ingénieur allemand du nom de Moritz Schulte rejoint la compagnie. Un an plus tard, sous l’impulsion de Moritz Schulte bien décidé à convaincre Siegfried Bettmann de fabriquer ses propres bicyclettes, la New Triumph Co. Ltd emménage dans une ancienne usine de tissage de rubans située sur Much Park Street à Coventry. La New Triumph Co. Ltd, redevenue entre temps Triumph Cycle Co. Ltd, fabrique et commercialise ses propres bicyclettes dès 1889. Il faudra attendre 1902 pour que Triumph s’oriente vers dans la production de motocyclettes équipées d’un monocylindre puis une petite année de plus pour les véhicules à trois roues.

Triumph Spitfire MKIV (1974) - Il était une fois
© D.R.

Les années passent et l’usine actuelle, maintenant installée sur Priory Street, ne permet pas la fabrication d’automobiles qui sont devenues très à la mode. Afin de résoudre le problème, Siegfried Bettmann rachète la Dawson Car Company située sur Clay Lane. Dessinée par Arthur Alderson assisté d’Alan Lea, Arthur Sykes (tous deux de la société Lea-Francis de Coventry) et l’ingénieur motoriste Harry Ricardo donnent naissance à la Triumph 10/20 en 1923. Équipée d’un moteur quatre cylindres de 1393 cm3 à trois vitesses, cinq modèles étaient disponibles : 2/3-Seater All Weather Tourer, Sports, Four-Door Weymann Saloon, 4-Seater Tourer et Three-Door Weymann Tourer. Suivront la Triumph 13/35 en 1924 (qui fût la première voiture anglaise à bénéficier de freins hydrauliques) et la Triumph Super 7 en 1927. Triumph cessera la fabrication de bicyclettes deux ans plus tard.

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Triumph Cycle Co. Ltd sur Priory Street, Coventry, Angleterre (© David Fry)
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Triumph 10/20 (© D.R.)

En 1933, le Colonel Holbrook vient remplacer Siegfried Bettmann à la tête de la Triumph Cycle Co. Ltd. Donald Healey (futur fondateur de la marque du même nom) viendra l’épauler en tant que directeur technique et les activités seront scindées en deux en 1936. D’un côté sa production d’automobile et de l’autre celle des motocyclettes.

En 1945, suite au conflit mondial et à la destruction de l’usine pendant les bombardements, la marque Triumph est au bord du dépôt de bilan. Sauvée par la Standard Motor Company, avec à sa tête Sir John Black, la firme sera mise de côté quelques temps au profit de berlines Standard et de tracteurs agricoles Fergusson.

Après avoir été renommée « Standard Triumph » et lancé le Roadster 1800 en 1946, La Mayflower, carrossée par Mulliner, arrive sur le marché en 1949. Partageant de nombreuses pièces mécaniques avec la Standard Vanguard, la Renown Mk1 fait également son apparition.

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Triumph Mayflower (© The Standard Car Review incorporating Triumph News, Nov. 1951)

Un an après le décès de Siegfried Bettmann le 23 septembre 1951, le prototype Type 20TS est présenté lors du Earl’s Court Motor Show et préfigurera le style des futures TR2 et TR3. La Renown Mk2 vient remplacer la Mk1. Supervisés par Ken Richardson, l’ingénieur Harry Webster, en collaboration avec le dessinateur Walter Belgrove, présente la TR2. Les premières TR2 sortiront de l’usine d’assemblage en 1953.

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Triumph Renown MK1 (© D.R.)
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Triumph TR2 (© D.R.)
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Triumph TR3S (© D.R.)

La TR2 est remplacée par la TR3 en 1956. Le projet « Zobo », qui préfigure la Herald, fait son apparition dans le bureau d’étude. La création de la carrosserie sera confiée au dessinateur italien Giovanni Michelotti qui officie déjà – entre autre – pour Ferrari, Bertone, Ghia ou Vignale. Standard Triumph débute la commercialisation de la Italia et de la Herald (berline et coupé) un an plus tard. Cette dernière, grâce à un nombre important de ventes (près d’un demi-million), sauvera l’entreprise en proie à de graves difficultés financières. La marque engage trois TR3 (à carrosserie en fibre de verre et portant le nom de TR3S) au Mans mais aucune ne terminera la course. Il faudra attendre 1960 pour que deux nouvelles variantes de carrosserie viennent s’ajouter au catalogue de la Herald : le break et le cabriolet. Afin de contrer la concurrence, Harry Webster envoie une Herald cabriolet, dotée d’un moteur de 948 cm3, au designer turinois Michelotti afin qu’il étudie une nouvelle carrosserie autour du châssis (appelé « Sport Six » par la marque) de cette dernière. De retour à Coventry, le prototype portant le nom de « The Bomb » qui préfigurera la future Spitfire, sera mis de côté. Côté compétition, ne voulant pas rester sur un échec, l’usine engage trois autres voitures au Mans. Celles-ci termineront la course mais ne seront pas classées pour n’avoir pas parcouru la distance réglementaire.

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Triumph Herald (© D.R.)
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Triumph Dove GTR4 (© D.R.)

British Leyland, dirigé par Stanley Markland, absorbe Standard Triumph en 1961 et devient la British Leyland Motor Company. Entre temps, la TR4, basée sur le châssis de la TR3A et équipée du moteur de la Standard Vanguard voit le jour. Dessinée par Michelotti, cette dernière affirme sa personnalité grâce à des lignes plus « latines » et un nouveau moteur qui viendra prendre place sous le capot dans un second temps. En parallèle, une série spéciale de la TR4 – la Dove GTR4 – est distribuée à destination d’une clientèle avertie. La Vitesse arrive également en concession. Basée sur le châssis de la Herald (renforcé, du fait de l’adoption d’un moteur six cylindres), ce modèle était également disponible en version cabriolet.

« The Bomb », renommée « Spitfire 4 » (pour 4 cylindres), fait son apparition au salon d’Earl’s Court de Londres en 1962. Elle sera équipée du moteur de 948 cm3 de la Herald. De son côté, la dernière Italia quitte la chaîne de montage. À noter qu’un petit nombre de TR3A ont été produites pour le marché américain et seront nommées TR3B du fait de l’augmentation de la cylindrée de leur moteur afin de répondre, encore une fois, aux normes anti-pollution.

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Projet « The Bomb » (© Giovanni Michelotti)
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En 1964, la Spitfire 4 évolue vers la Spitfire Mark 2 (Mk2). La Dove GTR4 disparaît du catalogue. Un an plus tard, la TR4 adopte un châssis à quatre roues indépendantes, prend le nom de TR4A mais verra sa production stoppée la même année. Lancement de la Triumph 1300.

En 1966, une version coupé de la Spitfire, dotée du moteur six cylindres de la Vitesse, sort des chaînes de montage. Elle sera nommée « GT6 » et la TR5 / TR250 apparaît sur le marché en 1967. Cette dernière se voit dotée d’un moteur 6 cylindres à injection. En parallèle, la Spitfire Mk2 change de nom pour devenir la Spitfire Mk3 et s’enrichit d’un nouveau moteur de 1296 cm3. Le carrossier Karmann redessine la TR5 / TR250 en 1968 qui prend ainsi le nom de TR6. La GT6 Mk2 vient remplacer la GT6 Mk1. La Vitesse est retirée de la vente. Les 2000 Mk1 et 2500 Mk1 disparaissent du catalogue l’année suivante.

Triumph Spitfire MKIV (1974) - Il était une fois
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Michelotti retouche le dessin de la Spitfire en 1970. Elle deviendra ainsi la Spitfire MkIV, profitant au passage d’un nouveau système de suspension arrière « swing spring » et d’une boite de vitesse entièrement synchronisée. La Triumph 1300 est remplacée par la Toledo. La Stag, la 1500, la 2000 Mk2 et 2500 Mk2 arrivent sur le marché. Remplacement de la GT6 Mk2 par la GT6 Mk3. Triumph stoppe la production de la Herald.

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Triumph Spitfire MkIV (© Giovanni Michelotti)
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Triumph Stag (© D.R.)

Triumph est associée à la marque Rover en 1972. La Spitfire 1500, bénéficiant d’un nouveau moteur de 1493 cm3 est lancée en avant-première aux USA et ce afin de répondre aux nouvelles normes anti-pollution américaines. Lancement de la Dolomite et de sa version « sportive », la Sprint. La Spitfire 1500 vient officiellement remplacer la Spitfire MkIV en 1974.

En 1975, La firme British Leyland rentre partiellement dans le domaine public afin de faire face au désastreux état financier de l’entreprise. La TR7 ainsi que sa cousine exclusivement destinée au marché américain, la TR8 (coupé et moteur V8) sortent de l’usine d’assemblage. La Toledo et la TR6 sont retirées du catalogue en même temps que l’arrivée de la TR7 cabriolet un an plus tard. La production de la Stag est arrêtée en 1977.

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Triumph Spitfire 1500 - Version US (© D.R.)

La marque Triumph est rachetée par Honda en 1980. S’en suivent l’arrêt de la production de la Spitfire et de la Dolomite (Sprint). Les dernières Spitfire quittent les concessions aux États-Unis en 1981 et la fabrication des TR7 et TR8 est stoppée. La Triumph Acclaim, dernière production de la marque, sera vendue sous le nom de Honda Ballade.

Triumph fait officiellement ses adieux au public et au monde de l’automobile en 1984. Aujourd’hui, la marque appartient au groupe BMW.

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